Rome insolite

Si vous avez parcouru des villes touristiques en période d’affluence, vous avez dû vous sentir emportés par de raz-de-marée humains et vous avez cru perdre un peu de la valeur des sites. Aussi, se retrouver à la mi-août dans une Rome surchauffée mais à demi déserte a quelque chose d’inhabituel.

 

Le Colisée, célèbre amphithéâtre, les thermes, les forums, les arcs de triomphe, les colonnes surmontées de l’aigle triomphale, ces monuments que les tout-puissants se sont fait ériger, nous les découvrons quotidiennement dans les encyclopédies. Mais cet été, leurs ordres artistiques, leurs dimensions nous sont devenus tangibles au fur et à mesure de notre pèlerinage.

 

En quête d’originalité, nous avons voulu quitter les circuits traditionnels, tout valables qu’ils soient, et remonter aux sources de la royauté et de l’organisation romaines.

 

Kit-bag à l’épaule, nous avons marché vers le nord pour découvrir la villa Giula, oasis nourrie des vestiges étrusques.

 

Si vous abhorrez les musées, si les visiter est pour vous un pensum, je vous proposerai une balade dans les jardins si bien entretenus qu’on n’y voit ni géaster, ni collembole, tout au plus pourrez-vous effrayer un haret ! Près des étangs aux nymphéas tels qu’en peignit Monet, vous rencontrerez peut-être des ablégats en congé ou des jeunes déguisés en chevau-légers.

 

Quant à nous, suivant les cicérones, nous avons sauté de plain-pied dans le passé et arpenté chaque galerie, fascinés par cet autre monde, insensibles à la longueur des itinéraires fatiguant nos vieilles jambes.

 

D’aucuns se sont plu à admirer les boucles d’oreilles et fibules en or, les lapis-lazuli et les pierres grenat enchâssés dans des chatons ciselés ; d’autres se sont délectés à examiner des anaglyphes parmi lesquels des cistes et brûle-parfums en bronze ; d’autres encore se sont attardés devant les hydries et amphores attiques ; la plupart ont découvert, ravis, les protomés des satyres, l’Apollon à la tunique hiératique et le couple souriant façonné sur le couvercle d’un sarcophage.

 

Ces chefs-d’œuvre, réalisés avec autant de précision que n’en ont montré les artisans des siècles ultérieurs, sont exposés dans les meilleures conditions possible de façon à ce qu’ils ne se dégradent pas davantage. D’où proviennent-ils ? Des tombes à puits creusés dans le tuf et des nécropoles toscanes datées des septième et sixième siècles avant Jésus-Christ , l’époque de l’apogée territorial des Étrusques.

 

Mais il est grand temps de conclure si je veux recevoir les imprimatur du comité et si je ne veux pas abuser de la patience des concurrents.

 

Je n’ai pas jeté les pièces de monnaie qu’il aurait fallu dans la fontaine de Trévi (Trevi) tout illuminée et toute scintillante mais je suis sûr que je retournerai à Rome, ne fût-ce que pour un bref séjour.

 

Abbé Duhayon