Ils sont venus, ils sont tous là, jamais las

La remise solennelle des récompenses, attribuées en fonction des résultats acquis durant les feus douze derniers mois, constitue leur grand-messe annuelle qui sera dûment suivie d'un modeste raout. Mais ces traditionalistes s'astreindront d'abord, blandices attendues, à un exercice supplémentaire de mise à l'épreuve de leur ahurissant bagage orthographique.

Plus d'un s'échangent les fruits derniers-nés de diligentes investigations menées dans les ouvrages de référence habituels. Les concouristes pomponnées font assaut d'élégance : le tailleur, la jupe à lés et la robe fourreau leur siéent à ravir. Certaines n'ont pas hésité, bien que cela coûtât bonbon, à se faire injecter la miraculeuse toxine botulique qui n'élimine que temporairement les rides exécrées et les cernes honnis. Bien appliqués sans verser dans les looks trash et provocants, gloss et blush font l'un l'autre pourtant merveille pour métamorphoser des traits tirés en un charmant minois enjôleur. Les futures dupes, de tous les sexes, jouent encore les tranche-montagnes pour conjurer l'anxiété de l'attente.

Le martyre, un régal pour masos cérébraux, peut commencer. Ils seront rapido tout décontenancés, tels des poissons qui barbotent dans des eaux apparemment paisibles où les surprendront bientôt les rets, droits ou dérivants, qu'y haleront des fileyeurs malintentionnés. La contention d'esprit nécessaire va de pair avec un environnement silencieux, maintenu tel à force de chuts répétés. Les dures-mères, les arachnoïdes et les pies-mères seront fouies comme il se doit, car il faut se creuser les méninges pour en exprimer engrammes, réminiscences et images eidétiques. Ô labile mémoire, qui ne laisses entrapercevoir que des lambeaux de souvenirs - crus pourtant irrémédiablement ancrés - pareils aux traces estompées de palimpsestes à demi effacés. Pour remédier à ces déficiences, l'ibuprofène se révèle vraiment inefficace voire déconseillé. En outre, la transfixion de l'organe défaillant n'est guère praticable.

Mais a contrario, la conception du texte n'a pas été une sinécure. Je me devais de dénicher et de développer toute idée congruente à la situation. Un nashi goulûment englouti suffisait souvent à calmer une faim naissante. Hypertendue (hyper-tendue), je sortais couramment de mes gonds suiffés à l'excès par le stress ambiant excellemment agrémenté de complications zostériennes et d'une fièvre puerpérale éreintante. Mes amphètes, mes psychotoniques chéris, m'ont permis d'atteindre à l'indispensable éréthisme mental.

 

(La suite du texte servira de test pour départager les éventuels ex æquo.)

 

Grâce au ciel, aucun coup n'était prohibé. Ils achopperaient peut-être sur l'antique conversion de l'hémine en onces, quoique je ne me berçasse guère d'illusions. En remontant les siècles, je garderais l'espoir, si vain semblât-il, de les prendre en flag de paramnésie. En ces temps anciens là, Zarathoustra (Zarathushtra), en véritable héraut du manichéisme, fit évoluer le monothéisme mazdéen vers un dualisme mitigé. Aujourd'hui, cette doctrine séduirait encore quelque cent trente mille adeptes, plutôt fin de race, appelés guèbres (Guèbres) par-ci et parsis (Parsis) par-là, selon qu'ils restèrent sur place - là où de révolutionnaires ayatollahs se sont vus succéder aux shahs (schahs, chahs) jugés trop pro-occidentaux - ou qu'ils migrèrent vers le pays des brahmanes, des kshatriya (ksatriya), des vaishya (vaisya), des shudra (sudra) et des parias.

Et si, en fin de compte, je ne parvenais pas à les prendre en défaut, si tous mes lacs s'avéraient inopérants, je conclurais par un mea-culpa (mea culpa) : « C'était trop facile, rends-t'en donc compte ! »

 

Julien DORSIMONT mai 2004
Champion de Belgique